Étape obligatoire et cruciale lors de l’onboarding de nouveaux participants à une plateforme en ligne, le KYC / KYB représente bien plus qu’une simple formalité administrative. Littéralement “Know Your Customer” et “Know Your Business”, ces acronymes constituent le fondement sur lequel reposent la conformité, la sécurité et la transparence des plateformes.
Entre obligations légales et impératifs opérationnels, le bon déroulé de la procédure KYC / KYB est un enjeu majeur pour tout administrateur de plateforme (marketplace, crowdfunding, réseau de commerçants…). C’est pourquoi, il est essentiel de connaître et de peaufiner l’intégralité du processus. Décryptage.
Les exigences du KYC / KYB d'un point de vue réglementaire
Le KYC / KYB est une série de processus et de procédures conçue pour vérifier l’identité des utilisateurs d’une plateforme, avant de leur fournir le total accès au service. Les exigences demandées varient en fonction de la nature de l’activité commerciale, de la juridiction réglementaire et des politiques internes de la plateforme.
Que dit la loi ?
La Banque de France, à travers son Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR), impose plusieurs lignes directrices en matière d’identification, de vérification d’identité et de connaissance des utilisateurs d’une plateforme. De plus, conformément à l’article R. 561-38 du Code Monétaire et Financier (CMF), tout organisme délivrant des services financiers doit disposer d’outils ainsi que de moyens matériels et humains lui permettant la mise en œuvre effective des obligations de vigilance prévues à l’identification et à la vérification, dans le cadre de relations d’affaires.
Cette disposition réglementaire imposée par le législateur vise principalement à prévenir toute activité frauduleuse, blanchiment d’argent et financement du terrorisme (LCB-FT) et se fonde sur plusieurs directives nationales et européennes (transposition de la directive UE 2015/849 révisée, arrêté du 6 janvier 2021, décisions de la Commission des sanctions…). La procédure de vérification intègre notamment :
- Les évolutions concernant les mesures de vérification de l’identité
- Les nouvelles obligations relatives au bénéficiaire effectif
- Les évolutions apportées aux registres des bénéficiaires effectifs
Que ce soit par le biais d’un Prestataire de Services de Paiement ou celui d’un agrément PSP, une plateforme est en mesure de fournir des services de paiement à ses utilisateurs (comptes de paiement, moyens et facilités de paiement…). Elle est ainsi dans l’obligation de se conformer aux exigences du régulateur en vérifiant l’identité de chacun de ses participants.
Quels sont les risques en cas de non-conformité ?
En plus d’un large éventail de risques financiers (fraude, blanchiment d’argent…) et réputationnels (satisfaction, confiance…), tout manquement aux exigences réglementaires expose la plateforme à des risques de non-conformité, pouvant conduire à des amendes sévères de la part du régulateur. Celles-ci peuvent ainsi être soumises à des enquêtes approfondies, entraînant des coûts juridique, administratif et opérationnel.
Chaque manquement aux exigences KYC / KYB peuvent compromettre la rentabilité et la viabilité à long terme de la plateforme, mettant en péril sa réputation et sa capacité à attirer de nouveaux utilisateurs.
La mise en œuvre de la procédure KYC / KYB d'un point de vue opérationnelle
Afin de garantir sa conformité et son efficacité, une plateforme doit soigner la mise en place de sa procédure KYC / KYB. Cela nécessite l’intervention de partenaires, l’intégration d’outils et la mise en place de procédures internes strictes.
Quel est le rôle du Prestataire de Services de Paiement ?
La validation de la procédure KYC / KYB atteste de la fiabilité du nouveau participant à la plateforme et l’autorise ainsi à démarrer son activité (vente de biens ou de services, projet crowdfunding…). La finalisation de cette étape conduit à la création d’un compte de paiement utilisateur, où seront déposés ses fonds perçus. Légalement ouvert par l’établissement en charge des activités de paiement marketplace de la plateforme, ce compte est bien évidemment soumis de nombreuses exigences techniques, sécuritaires et de conformité. C’est pour cela que l’administrateur de la plateforme et le Prestataire de Services de Paiement travaillent conjointement sur la cohérence et la sécurité du parcours de KYC / KYB.
Quel est le déroulé de la procédure KYC / KYB ?
Si la procédure KYC / KYB peut parfois sembler complexe aux administrateurs de plateformes en ligne, celle-ci est largement simplifiée par le PSP en charge, prenant en charge de nombreuses étapes.
Collecte de documents légaux
Cette phase initiale, généralement automatisée par un portail en ligne fourni par le prestataire de paiement, vise à obtenir des informations précises sur le nouvel utilisateur de la plateforme (nom, prénom, nationalité, pays de résidence…). Ce dernier devra ensuite transmettre tous les documents nécessaires à la vérification de son identité et/ou de sa société. La nature des documents demandés varie selon le type d’activité de la plateforme et du profil de l’utilisateur.
KYB – Pour les professionnels (liste non exhaustive) :
- Extrait de KBIS de moins de 3 mois
- Statuts de la société
- Document de répartition des parts de la société
- Pièce d’identité du représentant légal et des actionnaires détenant au moins 25 % des parts
- RIB de l’entreprise
KYC – Pour les particuliers (liste non exhaustive) :
- Pièce d’identité (ID, passeport…)
- Justificatif de domicile
- Avis d’imposition
Analyse approfondie des risques
Cette étape implique la vérification de la véracité des documents précédemment collectés et leur analyse à la lumière de critères prédéfinis. L’objectif est de déterminer le niveau de risque de chaque utilisateur. Cette analyse peut être réalisée manuellement par d’équipe conformité du PSP ou de manière semi-automatisée à l’aide d’outils de détection de fraude, basés sur des algorithmes et des modèles prédictifs.
Décision finale
La précédente analyse débouche sur l’approbation ou le rejet du nouvel utilisateur, conditionnant l’ouverture ou non d’un compte de paiement. Cette décision, généralement documentée et justifiée, est cruciale pour assurer la conformité réglementaire et la sécurité de la plateforme.
Quelles sont les bonnes pratiques à mettre en place ?
Afin de garantir l’efficacité et la conformité du processus de vérification d’identité des participants, une plateforme doit s’assurer de la mise en œuvre de certains éléments :
- Renouvellement périodique de la vérification des utilisateurs actifs pour s’assurer que leur activité soit toujours conforme
- Formation régulière des équipes chargées de l’analyse des pièces et de la prise de décision
- Révision régulière des procédures internes et de la documentation opérationnelle fournies pour assurer la cohérence et la traçabilité du processus
- Veille permanente en matière de réglementation et de LCB-FT afin d’assurer la conformité des processus aux normes KYC / KYB
Quel avenir pour le KYC / KYB ?
Alors que le paysage réglementaire, technologique et commercial continue d’évoluer, il est impératif pour les administrateurs de plateformes d’adopter une approche proactive en matière d’optimisation et d’évolution du KYC / KYB.
Dans un premier temps, celui-ci étant continuellement façonné par les évolutions réglementaires nationales et européennes, une révision régulière des processus est essentielle afin de s’adapter aux attentes du régulateur. Cela passe par une réévaluation périodique des procédures opérationnelles définies en interne et de sa documentation, afin de garantir la pertinence, la conformité et l’efficacité de son fonctionnement.
L’utilisation de nouvelles pratiques technologiques (reconnaissance, intelligence artificielle…) peut également permettre aux plateformes de renforcer la sécurité et la performance de leurs processus KYC / KYB, tout en réduisant les frictions lors de l’onboarding de nouveaux participants. En adoptant une approche axée sur l’innovation et l’adaptation, les administrateurs peuvent se positionner sur des enjeux d’automatisation des processus d’évaluation prédictive de risque et de personnalisation.
Enfin, la collaboration inter-plateformes pourrait jouer un rôle clé dans la lutte contre la fraude et le blanchiment d’argent, en permettant aux plateformes de d’échanger des informations sur les activités de leurs utilisateurs, conformément aux obligations de protection des données.